Ministre Dačić à la réunion ministérielle sur les Balkans occidentaux à Rome

05. fév 2024.
Le premier vice-président du Gouvernement et ministre des affaires étrangères de la République de Serbie, Monsieur Ivica Dačić a participé aujourd'hui à Rome à la réunion ministérielle sur les Balkans occidentaux.

L’intervention du ministre Dačić est transmise dans son intégralité :

Estimé Monsieur le Ministre Tajani,

Chers collègues européens,

Je voudrais, au début de mon intervention, remercier tout particulièrement la République d'Italie et le ministre des affaires étrangères Monsieur Tajani pour l'organisation de cette réunion. Je pense parler au nom de nous tous, habitants des Balkans occidentaux, en disant que le soutien du Groupe d’amitié relève d'une grande importance pour notre région et que nous l'apprécions grandement.

Bien que nous entendions constamment que la politique d'élargissement est une priorité de l'Union européenne, le nombre de ceux qui, comme vous, sont vraiment sincères et engagés dans leur intention de soutenir les Balkans occidentaux sur cette voie, n'est pas très élevé. Trente et un ans se sont écoulés depuis l'adoption des soi-disant critères de Copenhague, vingt et un ans depuis la présentation de l'agenda de Thessalonique et plus de dix ans depuis le dernier élargissement de l'Union européenne. Malheureusement, il a fallu le conflit en Ukraine pour donner un nouvel élan à l'Union européenne.

La politique d'élargissement est dans l'intérêt de la République de Serbie, dans l'intérêt de l’intégralité des Balkans occidentaux, et, j’en suis convaincu, elle est aussi dans l'intérêt de l'Union européenne et de tous ses états-membres actuels et futurs.

Je crois que c'est exactement dans cet esprit que le Plan de croissance pour les Balkans occidentaux a été adopté par la Commission européenne, avec l'annonce d'une aide financière de 6 milliards d'euros pour sa mise en œuvre. Nous sommes prêts à travailler sérieusement et de manière responsable à sa mise en œuvre, convaincus que cette initiative renforcera et rapprochera davantage nos économies et nos sociétés, mais aussi, nous l'espérons, elle accélérera le processus d'intégration européenne de notre région.

Par ailleurs, ce que nous demandons, c’est que tous les partenaires des Balkans occidentaux soient traités de manière juste et équitable dans le cadre de cette initiative et nous sommes opposés à toute politisation ou conditionnement politique de la participation.

Mesdames et Messieurs,

Rien n'est parfait, même pas l'Union européenne. Cependant, avec toutes ses vertus et ses défauts, ses crises et ses succès, nous conviendrons que l'Union européenne représente toujours la politique de paix, de stabilité et de développement économique la plus réussie au monde. Par conséquent, la réconciliation des partenaires dans les Balkans, ainsi que la rapidité du développement économique de notre région, dépendront, entre autres, de la volonté de l'Union européenne d'accueillir de nouveaux membres.

La République de Serbie se considère comme un futur membre de l'Union européenne. C'est l'objectif prioritaire de notre politique étrangère et nous nous engageons pleinement à atteindre cet objectif. Nous savons que les réformes sont la clé du succès de l'intégration européenne et nous ne demandons pas que quelqu'un fasse nos « devoirs » à notre place. Les réformes internes ne sont pas un but en soi, et nous ne les mettons pas en œuvre pour le bien de quelqu'un d'autre, mais pour faire de notre pays un endroit où il fait bon vivre. Ce que nous attendons, c'est que l'Union européenne, avec plus de confiance et moins de préjugés, mette en œuvre de manière plus décisive la politique d'élargissement dans les Balkans occidentaux et en République de Serbie.

Je dois souligner que nous ne sommes pas satisfaits que le processus d'intégration européenne de la République de Serbie prenne autant de temps, car il n'y a aucune raison objective à ce retard. La procrastination et le ralentissement de ce processus ont un impact négatif sur les tendances politiques et économiques de la région. Tout comme l'Union européenne, nous avons besoin de stabilité et de prévisibilité.

Je tiens à vous rappeler que la Commission européenne, dans le cas de la République de Serbie, a proposé d'ouvrir le groupe 3 – Compétition et croissance inclusive pour la troisième année consécutive – mais, malheureusement, ce n'est toujours pas le cas. J'insiste sur ce point parce qu'il s'agit précisément d'une question importante pour l'intégration économique et qui ne devrait pas être politisée.

Estimés ministres,

La République de Serbie, pour en parler honnêtement, est aujourd’hui en stagnation dans ses intégrations européennes à cause de la question d’harmonisation de sa politique étrangère avec l’Union européenne et ceci est dû, dans sa grande partie, à la question de notre position à l’égard de la guerre en Ukraine. Je me dois à nouveau à souligner que dans ce conflit, la République de Serbie n’est pas neutre. Nous soutenons les efforts de l’Union européenne, ainsi que de tous les autres facteurs internationaux pour trouver une résolution pacifique du conflit en Ukraine.

Egalement, il nous est souvent reproché que l’harmonisation de la République de Serbie avec les déclarations de l’Union européenne n’est pas au niveau de 100%. Je le répèterai une nouvelle fois – les intégrations européennes sont notre objectif stratégique et notre intérêt, mais elles ne sont pas les seuls. Dans la politique, ainsi que dans la vie, il est le plus difficile d’harmoniser les objectifs différents et nous ne pouvons pas nous permettre le luxe de mettre en cause tous les autres objectifs à cause d’un seul.

Après tout, notre obligation est d’harmoniser, par étapes, notre politique étrangère et de sécurité avec les politiques de l’Union européenne, et, à en juger par le pourcentage actuel d’harmonisation qui s’élève à environ 65%, je dirais que c’est exactement ce que nous sommes en train de faire.

Estimés collègues européens,

Nous savons que l'Union européenne attend de Belgrade un engagement constructif dans le dialogue avec Pristina. Et il est plus que clair que Belgrade est celle qui est constructive, mais cela, malheureusement, n'est pas suffisant pour le succès de ce processus. Il est indispensable que l'autre partie agisse de la même manière.

Comment l'Union européenne peut-elle espérer le succès du dialogue, alors que Pristina refuse obstinément d’assumer les obligations qu'elle a prises il y a longtemps ? Comment est-il possible que Pristina est tolérée lorsqu’elle ignore complètement l'accord dont l'Union européenne est elle-même garante ? Nous n'avons pas de réponse à ces questions – depuis plus d'une décennie.

En outre, Pristina, par ses actions unilatérales persistantes et continues, déstabilise gravement la situation et menace les droits fondamentaux, la sécurité et la survie des Serbes dans notre province méridionale. En témoigne la dernière mesure visant à abolir le dinar au Kosovo-et-Métochie, ce qui non seulement nous inquiète, mais remet également en question la survie des Serbes au Kosovo-et-Métochie, ainsi que le processus de dialogue lui-même. C'est pourquoi il est tout à fait incompréhensible que la seule réaction de la communauté internationale soit un appel à uniquement reporter les décisions de ce type, sans se demander si elles sont conformes à tous les accords conclus jusqu'à présent et quelles conséquences elles auront sur la vie des gens.

Chers collègues, les Serbes sont soumis à des conditions de vie insupportables. On ne voit donc pas comment il est possible de demander uniquement le report d'une décision dont l'objectif est l'expulsion d'un peuple de ce qui avait été son foyer pendant des siècles.

J'espère que l'ensemble de la communauté internationale comprendra vraiment la gravité de la situation actuelle. Nous ferons tous les efforts possibles pour protéger notre peuple au Kosovo-et-Métochie, j'espère avec votre soutien.

Mesdames et Messieurs,

Notre engagement et notre volonté de résoudre pacifiquement la question du Kosovo-et-Métochie sont le reflet de notre force et non pas de notre faiblesse, comme certains tentent de le présenter. La République de Serbie est attachée à la paix.

Je veux croire que l'engagement en faveur de la paix, la résolution de tous les problèmes par le dialogue, ainsi que la recherche d'un avenir plus stable et plus prospère pour tous les citoyens européens, sont précisément l'objectif que nous tous, assis à cette table aujourd'hui, nous nous efforçons d'atteindre.

Seule une Europe unie peut atteindre cet objectif.

Nous n'avons pas de temps à perdre.

Je vous remercie de votre attention.