Allocution du Ministre Dačić à la réception du Nouvel An

13. jan 2023.
Texte intégral du discours prononcé aujourd’hui par le premier Vice-Premier Ministre et Ministre des Affaires étrangères de la République de Serbie, Ivica Dačić, lors de la réception du Nouvel An.

Excellences,

Chers membres du Gouvernement de Serbie,

Chers collègues du Ministère des Affaires étrangères,

Chers représentants des médias,

Chers collègues et amis,

C’est un grand honneur pour moi de vous saluer à l’occasion de la réception traditionnelle du Nouvel An, organisée par le Ministère des Affaires étrangères pour le corps diplomatique. Comme vous le savez, nous œuvrons pour favoriser la tradition de ces rassemblements le jour du Nouvel An selon le calendrier julien, que l’on appelle officieusement, mais avec fierté, le Nouvel An serbe. En vous souhaitant tout le meilleur et notamment une bonne santé, je reste convaincu que le Ministère des Affaires étrangères continuera à représenter pour vous un interlocuteur adéquat et un partenaire fiable concernant toutes les questions pertinentes. Nos diplomates, que je félicite publiquement à cette occasion de leur travail et de leur engagement, poursuivront leurs efforts inépuisables afin d’améliorer la réputation de la Serbie et de représenter nos positions de principe sur la scène internationale.    

Dans la période à venir, les activités diplomatiques serbes seront orientées vers la réalisation des principaux objectifs et des priorités de notre politique étrangère qui consistent à sauvegarder la souveraineté et l’intégrité territoriale du pays, à devenir membre de plein droit de l’UE, à développer les relations de bon voisinage et la coopération régionale, à améliorer les relations bilatérales avec tous les pays du monde et notamment à promouvoir nos partenariats traditionnels, à contribuer activement au multilatéralisme tout en respectant pleinement les principes du droit international, à contribuer à la paix et à la sécurité, et enfin, à continuer à aider et à soutenir les citoyens serbes dans le monde entier. La paix dans le monde est en danger. La guerre en Ukraine commence à ressembler à un conflit mondial avec des conséquences pour le monde entier.

Chers amis,

C’est justement pour ces raisons que nous œuvrerons en faveur de la paix, de la détente, du respect des principes universels de souveraineté et d’intégrité territoriale, ce qui représente une priorité de notre ordre national vers laquelle la République de Serbie oriente ses activités de politique étrangère. Malheureusement, nous avons un chemin difficile à parcourir dans nos efforts pour remplir cette tâche, qui peut paraître simple, mais qui, en réalité, est extrêmement compliquée et complexe. Et c’est d’autant plus que nous sommes déconcertés par l’interprétation arbitraire et sélective du droit international public, puisque nous considérons que la force de chaque principe repose sur sa mise en œuvre intégrale et universelle et une observation inconditionnelle. Permettez-moi de saisir cette occasion pour réitérer notre gratitude aux pays qui persévèrent dans leur non-reconnaissance de l’indépendance unilatéralement proclamée du prétendu Kosovo et à ceux qui ont révisé et qui réviseront leurs positions tant qu’on n’aura pas trouvé un règlement de compromis durable.

En même temps, je tiens à souligner notre position claire, réitérée maintes fois, que toute tentative de règlement de la question kosovare n’est possible qu’à travers le mécanisme du dialogue établi entre Belgrade et Priština. L’intervention de Belgrade, dans le cadre de son dialogue avec les institutions temporaires de Priština, comporte trois lignes rouges –

Premièrement, tout ce qui a été signé à ce jour – la Résolution 1244 de l’ONU, l’Accord de Bruxelles, l’Accord de Washington – doit être mis en œuvre,

Deuxièmement, la Serbie ne peut pas reconnaître l’indépendance de Priština ni consentir à son adhésion à l’ONU et

Troisièmement, et peut-être le plus important, nous souhaitons assurer les pleins droits et la sécurité totale des Serbes au Kosovo et Metohija.

Dans le courant de l’année précédente, vous étiez témoins de notre engagement total dans le dialogue à Bruxelles, qui reflète notre détermination sincère à trouver des solutions aux problèmes existants. En même temps, nous défendons une position claire, ferme et consistante selon laquelle tout règlement doit reposer sur un compromis, dans le plein respect de nos positions et intérêts. Malheureusement, nous pouvons constater qu’avec ses actions unilatérales, l’administration actuelle de Priština continue délibérément et systématiquement de provoquer des tensions, créant un climat de méfiance. La dernière d’une série de conséquences du comportement destructif de Priština était la tentative de meurtre d’enfants serbes près de la ville de Štrpce la veille de Noël, fête chrétienne la plus joyeuse. Nous considérons que de tels comportements et incidents doivent être plus largement condamnés par la communauté internationale, et que les causes de la situation actuelle doivent être correctement identifiées. Les missions internationales de la KFOR, de MINUK, et d’EULEX sont particulièrement importantes pour la communauté serbe au Kosovo et Metohija. La situation sécuritaire dans la Province exige, malheureusement, une présence constante de ces missions, sinon accrue. Par ailleurs, nos activités multilatérales dépendent également de nos intérêts vitaux au sein des foras internationaux – à savoir empêcher l’adhésion du prétendu Kosovo aux organisations internationales. A cette phase du dialogue, notre position est que nous devons nous diriger entièrement vers un règlement de compromis, et qu’il conviendrait de ne pas gaspiller inutilement l’attention si indispensable au dialogue. C’est pour cela qu’il est également inacceptable de tolérer les efforts de Priština de profiter de la situation internationale actuelle et de réaliser son dessein politique. Pour notre part, je vous assure que nous poursuivrons notre engagement puissant afin de préserver la paix et la stabilité, et que nous continuerons à défendre le droit international, notamment la partie relative à l’intégralité territoriale et la souveraineté des pays membres de l’ONU.

La Serbie croit toujours que son adhésion à part entière à l’UE est atteignable et que la promesse de Thessalonique représente un objectif réaliste et réalisable. Dans cette optique, remplir les critères sur la voie d’une adhésion complète demeure l’une des priorités essentielles de notre politique étrangère, étant en même temps l’objectif stratégique de tous les gouvernements serbes de ces vingt dernières années. À l'heure où l’Union européenne elle-même se retrouve devant une sorte d’épreuve et lorsque les avis préconisant le besoin d’un remaniement intérieur s’endurcissent, notre message consistant et réitéré à plusieurs reprises est que la réforme de l’UE doit être parallèle au processus d’élargissement. Nous considérons que ces processus ne s’excluent pas l’un l’autre, mais qu’ils sont complémentaires, et dont l’objectif reste d’atteindre l’unité et la solidarité sur le continent européen.

Mesdames et Messieurs,

Depuis l’éclatement du conflit armé en Ukraine, les questions de savoir si la Serbie devrait devenir membre de l’UE se font de plus en plus entendre. Notre réponse est claire – la Serbie appartient à la famille européenne et à la communauté des nations à tous égards. À ce propos, nous ne sommes pas guidés uniquement par les indicateurs économiques et le fait que l’Union européenne soit notre partenaire économique principal. Au contraire, la Serbie a choisi la voie européenne notamment en raison du pouvoir de transformation du processus de négociations, car nous sommes convaincus que notre dévouement aux réformes permettra une meilleure vie et un avenir plus prospère de nos citoyens. Cependant, pour arriver à cet objectif que nous croyons mutuellement bénéfique, il est nécessaire que nous maintenions cette perspective européenne vivante, car elle est le catalyseur des réformes et de la prospérité non seulement en Serbie, mais dans toute la région. C’est pour cela que nous avons besoin de grands pas et d’un progrès tangible dans les négociations, ainsi que d’une disponibilité plus importante de certains membres de l’Union européenne quant à l’accueil de nouveaux membres. L’occasion pour de telles avancées se présentera déjà lors de l’actuelle présidence suédoise du Conseil de l’Union européenne.

Seule une pleine intégration de la région des Balkans occidentaux pourra assurer un achèvement efficace du projet de l’UE, ce qui rendrait possible l’unification du continent européen.

Je ne peux pas omettre de m’attarder sur un autre sujet important. La Serbie est attachée à sa coopération intense avec l’Union européenne dans le domaine de la politique étrangère et sécuritaire. Je rappelle que nous ne sommes toujours pas membre et que nous ne participons pas à la création de la politique étrangère de l’Union européenne. Dans la période de préadhésion, la Serbie est dans l’obligation d’aligner graduellement sa politique étrangère et sécuritaire avec les politiques de l’Union européenne. Et justement, nous œuvrons pour réussir une harmonisation complète dans ce domaine en effectuant une adaptation progressive. Il serait extrêmement injuste de s’attendre à des avancées au moment où il n’y a pas de progrès concret et lorsque la disponibilité pour l’accueil de nouveaux membres est remise en question, ainsi que la sauvegarde de l’intégrité territoriale et de la souveraineté à cause de la pratique du deux poids deux mesures. Par ailleurs, le processus d’harmonisation de notre système aux normes et recommandations de l’UE a été poursuivi dans le cadre de la politique des visas. Nous avons besoin d’une cohésion des positions des pays membres à l’égard de la politique d’élargissement et d’un signal politique clair que l’élargissement est viable et réel.

Mesdames et Messieurs, 

Notre voie européenne n’exclut pas notre engagement consistant à développer la coopération avec les pays d’autres régions et à promouvoir les amitiés traditionnelles avec des pays d’Afrique, d’Asie-Pacifique et d’Amérique du Sud. Quelle que soit la distance géographique, nous cultivons un grand respect et des sympathies mutuels et attachons de l’intérêt à l’approfondissement et au renforcement de la coopération et de l’amitié entre nos peuples. 

Je souhaite tout particulièrement souligner que la Serbie est déterminée à redéfinir les relations avec ses voisins, en surmontant les questions ouvertes du passé et en visant à orienter nos agendas bilatéraux vers l’avenir. Ma récente visite à Zagreb reflète ces efforts. À cette occasion, j’ai souligné, entre autres, à quel point il était important d’instaurer la confiance, de renouveler la communication stratégique et d’harmoniser nos objectifs en tant que gage d’un meilleur avenir. Nous devons surmonter les questions et les différends historiques en construisant des fondations et des ponts solides, basés sur un avenir commun ; nous ne pouvons pas choisir nos voisins, mais nous devons absolument travailler ensemble. Nous sommes particulièrement intéressés par tous les mécanismes de promotion de la coopération régionale, mais considérons que le rapprochement régional ne peut et ne doit en aucun cas remplacer les avantages d’une adhésion à part entière à l’UE. Vous n’êtes pas sans savoir qu’une adhésion complète sert d’accouplement aux agendas politiques de la région. Quant aux initiatives régionales, je noterais particulièrement le Mini-Schengen, un exemple de rapprochement autochtone, fondé dans la région afin de créer des meilleures conditions de vie. Outre les avantages économiques évidents de cette initiative pour toutes les parties intéressées, elle comporte une dimension plus large, notamment dans le rapprochement des gens de cultures différentes et la promotion de la diversité culturelle, ce qui contribue certainement au développement global des sociétés dans cette partie de l’Europe. Avec l’Albanie et la Macédoine du Nord, la Serbie a reconnu dans cette initiative une voie plus rapide vers le développement socioéconomique, la prospérité scientifique et technologique et le renforcement continu des liens culturels entre nos peuples. En même temps, elle nourrit l’espoir que cette initiative se propagera bientôt dans toute la région. D’une certaine manière, c’est en fait un autre moyen par lequel la Serbie continue à contribuer à la paix, à la stabilité et au processus de réconciliation dans la région, tout en apportant certainement une contribution importante à la sécurité au niveau mondial.  

Au niveau multilatéral, la Serbie œuvre pour consolider sa position internationale et apporter une contribution active au futur développement du multilatéralisme. Nous sommes fermement convaincus que le multilatéralisme est l’unique réponse à tous les enjeux globaux, qui se compliquent au quotidien, dépassant les capacités individuelles des Etats, que ce soit la pandémie, le réchauffement climatique ou les objectifs du développement durable. Pour cela, nous avons besoin d’une action plus large, de la solidarité et de l’unification au niveau global. La Serbie est déterminée à trouver dans la coopération internationale les réponses à tous les défis sécuritaires modernes. Nous voyons l’Organisation des Nations Unies comme un forum et une institution essentielle dont nous devons rétablir la réputation, car nous considérons que seule l’ONU possède les capacités nécessaires pour un dialogue plus large et plus inclusif visant à formuler une réponse commune aux défis des tendances mondiales actuelles.

Dans le domaine de la politique sécuritaire, outre la préservation de la paix et de la stabilité régionales, la priorité de la Serbie est sa participation aux missions de maintien de la paix et aux opérations de l’UE et de l’ONU. Ainsi apportons-nous une contribution active à la stabilisation des conjonctures mondiales. En même temps, nous sommes prêts à partager la responsabilité dans la confrontation aux défis sécuritaires au niveau global. Il est particulièrement curieux que, par rapport au nombre d’habitants, la participation aux missions et opérations de l’UE et de l’ONU place la Serbie au sommet même des pays contributeurs, ce qui reflète le mieux notre politique pacifique.

Lorsqu’il s’agit des services que nous fournissons à nos citoyens, nous prévoyons en 2023 un élargissement ultérieur et la modernisation du réseau consulaire, ainsi que l’amélioration de la qualité des services consulaires pour nos citoyens dans le monde. En même temps, des activités visant la libéralisation du régime des visas ont été entreprises grâce à la conclusion de plusieurs accords bilatéraux, ce qui signifie que l’élargissement du cercle des pays où nos citoyens peuvent voyager sans visas se poursuivra en 2023. Les citoyens serbes peuvent se rendre sans visa dans 136 pays, tandis que le passeport serbe se retrouve à la 38e place selon la dernière projection du Classement Henley des passeports pour l’année courante. Nous œuvrons activement à la préservation de l’identité nationale et culturelle de la diaspora et des Serbes dans la région, tout en renforçant la position des minorités en Serbie.

Je souhaite souligner notre soutien à la politique de M. Aleksandar Vučić, une politique de paix et de stabilité, et exprimer ma reconnaissance au Cabinet du Président serbe, Aleksandar Vučić, pour une coopération extraordinaire. Je tiens également à remercier le Cabinet de la Première ministre, Ana Brnabić et le Gouvernement serbe, mes homologues, ainsi que les représentants des autres institutions de la République de Serbie présents ici aujourd’hui, avec la conviction que nous poursuivrons notre coordination et notre coopération performantes afin d’atteindre les objectifs définis conjointement.

Enfin, je suis très reconnaissant que vous soyez venus si nombreux et je souhaiterais que vous transmettiez à vos capitales et aux sièges de vos organisations le message d’un attachement ferme de la Serbie à une coopération globale et étendue avec vos pays et organismes dans tous les domaines d’intérêt commun. La Serbie est un partenaire fiable qui œuvre en faveur du renforcement des relations bilatérales et multilatérales à travers l’intensification du dialogue à tous les niveaux, car, en fin de compte, notre rôle est de communiquer, même quand nos points de vue divergent, l’unité ne pouvant pas être assurée que par le biais du dialogue.

Dans ce sens, je voudrais porter un toast à la paix dans le monde, à la paix et à la stabilité dans notre région et dans notre pays, ainsi qu’aux succès futurs ; je le ferai avec un verre de slivovitz, qui depuis l’année dernière figure sur la Liste du patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO.

À la nôtre !

Photo : MAE